31ème rencontre: Manger, Créer, Voyager

Manger, Créer, Voyager

Carpe diem

La manifestation européenne du Goût et du Slow food, Eurogusto, a accueilli la plateforme « Créativités & Territoires » pour sa 31ème session de notre dispositif nomade à l’écoute des formes de la création collective et des avatars multiples de la créativité territoriale. Le menu était copieux : notre exercice maïeutique mené en duo avec Jacky Denieul sur le subtil entrelacs des signaux faibles et des controverses, s’est progressivement transformé en une véritable journée d’études « Manger, Créer, Voyager » organisée par Stéphane Merceron, président d’Eurogusto, à la veille de la Biennale du Goût de la Biodiversité et des Cultures Alimentaires, dont il organise la seconde édition à Tours. Accueillis dans la lumineuse École Supérieure de Commerce et de Management de Tours (ESCEM), nous avons entendu à la fois des exposés d’alerte sur la mue de transports, la mobilité du marché et l’historique des routes pédestres, entre bilan carbone et désir touristique, et des exemples détaillés de la « Slow attitude », choisis entre le Val de Loire et l’Auvergne.

Philosophies du Goût et de la Création

De fait, nous sommes passés de la pollinisation du « parfum qui nous rassemble » (la rencontre du 5 novembre 2010 à l’invitation du Pôlau) à la cuisine partagée entre militants des bonnes pratiques sur la continuité du « bon, propre et juste ». Citons pour introduire nos échanges le poète allemand Hölderlin, « Rien d’important ne se construit sans amis ni banquets préparés » (cela ne mange pas de pain…) et rajoutons-y, pour assaisonner le ragoût de notre synthèse, la remarque savoureuse du poète et traducteur Yves Bonnefoy, natif de Tours, « Le lecteur peut créer une œuvre autant qu’en recevoir nourriture ».

 

Dans un passé proche, Rabelais, médecin et écrivain natif de Touraine, appelait de ses vœux truculents, une générosité de partage, au travers de l’oracle de la Dive Bouteille : « Nous considérons que le souverain bien n’est pas de prendre et de recevoir mais de distribuer et de donner et nous nous estimons heureux non pas si nous prenons et nous recevons beaucoup d’autrui, comme par aberration les sectes de notre monde le décrètent, mais si toujours nous distribuons et donnons beaucoup à autrui ».

 

Revenons par les bases aux enjeux de cette journée. Après la métaphore du jardin d’Éden, métaphore en son temps de la Touraine, la cuisine est le lieu de la toute première référence humaine de la création entre les imaginaires de l’accouchement et l’atelier. Annonçant la maxime de la Slow attitude, le « bon, propre et juste » cité plus haut, Rabelais nous tance du plus profond de sa philosophie humaniste : « Ne buvez que du meilleur. Buvez du solide ». Manger solide, rencontrer la diversité et garder la curiosité, voilà des maîtres mots de géants. Et le poète Yves Bonnefoy de renchérir, cinq siècles plus tard, sur une qualité de vie qui signifie toute entière l’être qui l’exprime : « Il s’agit en fait d’élargir les bases de la conscience. La longue chaîne de l’ancre, c’est celle qui arrime l’esprit humain dans les eaux profondes de l’inconscient, lieu de pensée autant que de vie. »

 

Créer c’est vivre, non pas de façon mimétique, mais par un vertige où l’être humain projette quelque chose qu’il ne connaît pas dans un monde aux contours indéfinis ou discontinus. L’enracinement culturel dans un territoire, dans un environnement nourrit à la fois ce « besoin d’être » et de « bien-être ensemble » et développe la curiosité pour l’autre. Ce n’est pas la seule satisfaction du savoir de l’artisan à la rencontre du goût raffiné du consommateur. Le double processus créatif et conservatoire, dans ses dispositifs multiples et discontinus, suppose une approche circulaire, à multiples questionnements, à l’écoute d’une organisation implicite du monde et de son environnement. Créer c’est à la fois résister, s’écouter et accepter les fils invisibles qui nous relient aux autres. Autrement dit, un exercice d’équilibre et de composition dynamique qui agit sans cesse, bien au-delà des labellisations de produits.

 

Tours au carrefour des saveurs

L’éveil sensoriel a une longue histoire en ce pays. En 1974, Jacques Puisais lançait les premières « Classes du Goût » dans les écoles primaires de la région de Tours. En 2006, un Institut Européen d’Histoire et des Cultures de l’Alimentation était fondé, lançant des travaux d’études et de recherches dans tous les domaines intéressant l’alimentation en Europe, et ce dans une perspective de connaissance historique.

 

Le 16 novembre 2010, l’UNESCO faisait un cadeau épicurien à la ville de Tours : « Le repas gastronomique des Français était officiellement consacré pratique sociale coutumière destinée à célébrer les moments les plus importants de la vie des individus et des groupes. Le repas gastronomique met l’accent sur le fait d’être bien ensemble, le plaisir du goût, l’harmonie entre l’être humain et les productions de la nature. Il s’agit d’un repas festif dont les convives pratiquent, pour cette occasion, l’art du « bien manger » et du « bien boire ». Tours en effet, patrie du symbolique géant populaire « Pantagruel » (étymologiquement du grec « assoiffé de tout »), bien vivant dans sa chair désirante et sa bonne chère, s’empare d’un patrimoine subtil qui délaisse les monuments pour l’expression du vivant. Slow Food ne pouvait que rencontrer la ville de Tours.

 

De fait et pour l’instant, la slow attitude relayée par d’Eurogusto, correspond à un « revival » ancien : elle s’exprime comme une guilde humaniste qui puise ses racines dans les corporations de métier du Moyen Âge où la qualité de la fabrication et des ingrédients étaient soigneusement soupesés. Cette double origine puise au-delà de la Touraine, aux racines profondes de l’Europe grâce aux deux héros nomades de la parole et du gosier : Pantagruel (1532, édité à Lyon) et Till l’Espiègle (1511), premiers grands romans burlesques d’une revendication populaire du mieux vivre. Les figures affamées de savoir de Pantagruel et Till Eulenspiegel (l’expression ul’n spegel veut dire « je t’emmerde … en bas allemand) surgissent comme des « fripons divins » immémoriaux des sagas de légende : la part du peuple s’insurge avec eux contre l’hypocrisie des dominants, le somnambulisme des clercs, la faconde des représentants des États.

 

Tous ensemble héros populaires et géants nomades du Val de Loire à la Flandre et à l’Allemagne, suivant les routes de Saint Martin de Tours ou du Monte Gargan italien (dont est issu l’imaginaire de Gargantua, père de Pantagruel), cette circumnavigation des goûteurs suit la course du soleil sur les produits de la terre. Réfléchissons ensemble au paradoxe de ce nonchaloir vigilant qui nous vient de l’Italie turinoise et piémontaise des années 1990, hostile à un mode de vie informatisé qui, selon la mesure carbone, pèse autant que le mal des transports, dans nos vies d’êtres humains issus de la nature. L’exigence de qualité (« bon, propre et juste ») et des saveurs croisent le respect d’une terre vivante. Si cuisiner c’est expérimenter à la source des mets, « manger est un acte agricole » (Brillat Savarin cité par Stéphane Merceron) et, comme le souligne Louis Albert de Broglie (Le Prince Jardinier, Deyrolles), initiateur au château de la Bourdaisière d’un Conservatoire de la Tomate collectionnant plus de six cent cinquante variétés de fruits, le détournement de l’agriculture et de la « bonne alimentation » a été un acte politique.

 

Naviguer en eaux calmes

Quand on met dans le même sac des poissons tels que manger, créer, voyager, on suscite des mouvements inattendus qui troublent les eaux à de multiples niveaux. Jean-Pierre Willot, professeur d’histoire contemporaine à l’université François Rabelais à Tours, nous a brossé le développement de cette mobilité collective qui se situe à l’intersection des délocalisations ferroviaires et aux pratiques rapides du déjeuner, pris sur le pouce collectivement puis individuellement hors des lieux de travail. La gastronomie des buffets de gare a laissé sur la IIIe République une durable empreinte.

 

Le « bien manger » qui nous occupe désormais est une conjugaison attentive de la responsabilité qui se veut un ciment, un liber, un dialogue calme. Il faudrait prendre son temps pour comprendre les liens de l’humanité entre la conscience, le désir (cf. « Désir, principe de toute passion » selon le tourangeau Balzac), les papilles et le nomadisme au sens de « l’esprit nomade » de l’essai de Kenneth White. Le Val de Loire est, depuis la Renaissance, un lieu de navigation artistique et littéraire raffinée entre la France et l’Italie: le toscan Léonard prépare la route du tourangeau Ronsard dans un passé de sfumato et de roses où pour être reçu par les rois, il fallait, entre Talcy et le Clos-Lucé, cultiver la poésie, la peinture et le risque.

 

Associer le voyage à la création ouvre le champ du tourisme. Tourisme solidaire, tourisme responsable, tourisme curieux, voir créatif s’il consent à détacher ses regards des visites des châteaux et lieux d’exception. Léonard de Vinci n’avait-il pas conçu le projet de relier la Loire au Rhône ? La controverse point entre un écotourisme contraint par la nature et un « tourisme créatif » qui connaît mal ses limites. De fait, le tourisme est sociologiquement devenu un domaine spécifique de l’activité humaine de loisir : non délocalisable (sauf en visite virtuelle), issu d’une dynamique de pays riches et urbanisés, il ne concerne qu’un septième de la population. L’anthropologue Yassir Yebba suggère que le tourisme est une vision occidentale, fondamentale anti-nomade et auto centrée, alors que le francophone vit son séjour en France comme un pèlerinage culturel.

 

Ouvrir l’espace du tourisme apparaît comme une activité inventive et plurielle : canoë-kayak sur la Loire avec bivouac, marches sur les coulées vertes, ouverture et sécurisation de chemins du passé, telles les voies européennes de l’immigration médiévale et antique où s’entrecroisent les migrations qui ont fait l’Europe, forcées ou désirantes.

 

Les voies de pèlerinage, abandonnées aux mauvaises herbes depuis le XVIIIème siècle (au Moyen-Âge, Tours était la troisième ville de pèlerinage occidental avec Rome et Jérusalem) reprennent vie sous l’impulsion laïque du Conseil de l’Europe qui, au travers de trois voies de la Hongrie (Szombathely, ville de naissance de Saint Martin de Tours) à la Touraine, relient les peuples marcheurs. La figure errante de Till Eurlenspiegel rejoint à nouveau celle de Gargantua entre Trêves, les Pays-Bas et le Luxembourg. C’est à l’automne 2011 que se sont ouvertes ces « bandes vertes citoyennes » (Antoine Selosse) avec des haltes festives inspirées de l’été de la Saint-Martin qui se fête le 11 novembre. Un temps mythique à relier avec le 17 novembre, jour de notre rencontre, anniversaire du décès d’un autre évêque, Grégoire de Tours, figure arverne du patrimoine tourangeau. Le « slow travel » retisse des mémoires fluviales entre l’Europe de l’Est, le Val de Loire et la Limagne. Quelque douze Véloroutes se sont construits sur l’espace européen depuis 1994 : le Véloroute des Fleurs (Loire-Rhin-Danube) rejoint le concept de « Loire Solidaire ».

 

En cet automne 2011, nous traversons des temps politiques de vertige que seuls le voyage et l’addiction avaient pu approcher. Partir le plus loin possible s’apparente pour certains à un shoot qui les délivre momentanément d’un mal-être. La crise contemporaine, liée à notre absence de mobilité concrète, se développe par une prolifération d’entités consommatrices qui, comme la maladie du cancer, ne communiquent plus ensemble dans la forme créatrice qui devrait être la leur. Nous voyageons avec nos bagages culturels, entraves qui nous empêchent souvent de dialoguer avec ceux qui nous accueillent, dans une relation mécanique d’échange entre une plage ensoleillée, une piscine et quelques euros. Beaucoup d’intervenants ont souligné l’incroyable grossièreté française qui se délivre de sa citoyenneté universelle dès que, nanti d’un passeport, le touriste national foule le sol étranger.

 

Sous la plage, les pavés

A l’inverse, le tourisme de voisinage se combine mal avec des voyages virtuels dont Kafka et Pascal ont dénoncé dans leurs écrits la vanité.

 

Peux t’on parler d’une addiction au voyage quand les Baléares sont desservies aujourd’hui par 27 vols journaliers de Düsseldorf à Palma ? L’industrie du tourisme n’est pas, tant s’en faut, le cœur du voyage et l’exposé du professeur Jean-Paul Ceron (ESCEM) rappelle précisément que le tourisme des avionneurs influe nocivement sur le réchauffement climatique. 75 % du CO2 ambiant provient des transports. Le tourisme européen pollue autant que l’Inde toute entière. Alors que l’on réduit le maillage ferroviaire depuis les années 1930, asphyxiant les routes et les voyages nationaux, le transit aérien français reste volontairement peu taxé alors que les politiques savent bien qu’il conduit à une impasse écologique. Dans un futur proche, nous allons restreindre les voyages vers les Antilles, tandis que la Méditerranée prendra une place centrale (et politique) dans les destinations solaires. Faut-il souhaiter que les politiques européennes inventent un métro européen qui relie les plagistes au Maghreb ? Les révolutions ne se font pas à la plage mais sur les marchés.

 

Voyager ce n’est pas seulement transporter ses frustrations dans un espace nostalgique ou solaire. Voyager, c’est aussi recréer du lien par les saveurs et les gestes, une attention aux routes des autres. Partir, c’est sans doute mourir un peu mais c’est aussi se régénérer. Pour accompagner les mutations de nos sociétés de la dépression et de l’opulence sélective, la mesure revient au sensible et au concret mais aussi à l’exigence épicurienne classique, celle qui se nourrit de peu mais en qualité.

 

L’anthropologue Frank Michel (Déroutes et détours-l’Autre voie), qui travaille entre Strasbourg, l’Amérique latine et Bali, rappelle que tourisme et dictature font généralement bon ménage, que l’on doit désormais inventer des rencontres insolites telles que l’immigration et suggère de méditer le concept « touriste chez soi, autochtone chez les autres », dans la logique de la Carpe sacrée des temples de Hanoï, celle qui nage à contre-courant. Les meilleurs passeurs entre les cultures sont les immigrés riches de plusieurs cultures.

 

Philippe Callot, professeur à l’ESCEM cite le proverbe chinois « le poisson pris dans la nasse commence à réfléchir » et utilise la métaphore de la Reine et du Roi dans le jeu des échecs : la Reine, dès qu’elle le peut, bouge sur tout l’échiquier alors que le Roi adopte le rythme lent des sorties de proximité. C’est pourtant le Roi qui détermine en dernier ressort l’aventure des échecs et sonnant la fin de partie. Chi va piano, va sano e va lontano : il faut imaginer des outils de mobilité simples pour revenir à une stratégie collective du bien-être.

 

Attentive à la grotte des merveilles, celle de notre palais, la mesure du bilan carbone est en passe de devenir un des sésames du slow. Nous avons entendu plusieurs initiatives attachées au respect de l’approvisionnement dans un périmètre de quatre-vingt kilomètres, des chambres d’hôte de Léotoing (Haute-Loire, près de Brioude) qui conjuguent des offres culturelles autochtones à l’Éco hôtel « les Orangeries » de Lussac-les-Châteaux (Olivia Gautier), un modèle d’une hospitalité traditionnelle qui conjugue les soins du potager avec la mesure du bilan carbone des mets servis. Il faut aussi accepter des apparentements multiples où le voyageur rencontre l’hospitalité dans la diversité de ses coutumes et des échelles d’offre : la capitale réfléchit également à une diversification écologique et créative des offres touristiques et David Millier (Association pour le Développement de la Création, Études et Projets-ADCEP) est chargé de préparer le sommet mondial du tourisme créatif à Paris.

 

Les sentinelles des volcans

Pour filer la métaphore poissonnière, l’Auvergne, pays des saumons, peut adopter la devise « ce sont les fous qui tombent à l’eau et ce sont les sages qui pêchent ». André Chapaveire (président du Comité Régional du Tourisme) insiste sur l’effort prioritaire en Auvergne d’un tourisme de découverte, vert et de promenade. « Les nouveaux design du voyage » (Philippe Callot) explorent la mobilité douce, privilégiant la découverte des espaces sur la dépense du temps. Cette redécouverte de l’Auvergne (particulièrement du Cantal très dynamique dans ce domaine), forme une trilogie active entre les « sentinelles du slow » (telle la trilogie Arverne : lentilles blondes de Saint-Flour, viande de Salers, fromage), les chambres d’hôte et les festivals. Les parcs nationaux peuvent jouer un véritable rôle, au travers d’initiatives telles que Gîtes Pandas (Jean Bernard Marsat) s’ils restent attentifs à la diversité transversale des initiatives publiques privées et associatives des nouveaux migrants et des créatifs culturels (cf. synthèse « Arts ForeZtiers ») et qu’ils osent sortir des logiques frontalières des départements et communautés de communes.

 

Plus profondément, la qualité vantée de l’Auvergne des montagnes bleues repose depuis les années 1930 la question du tourisme social, respiration nécessaire de ceux qui, pour des raisons de pauvreté, ne partent jamais en vacances ni ne goûtent la qualité des produits de la ferme. Le réservoir vert de la France attire les vacanciers issus des métropoles, celles qui paradoxalement questionnent l’entrée de la végétation (herbes folles et arbres protégés) et des animaux sauvages (renards, fouines, sangliers) avides des poubelles de la cité. Au-delà des initiatives des « villes forestières » à l’instar des expériences anglo-américaines, les communautés qui ne partent pas en vacances pourraient s’inspirer de cette courageuse initiative d’un quartier urbain et défavorisé de San Francisco, qui décida un beau matin de l’an 2000 de partir pique-niquer ensemble sur les plages de l’océan : un flot humain hilare, cinq mille personnes à vélos, en fauteuils roulants, poussant des landaus, courant ou en patins à roulettes, migrèrent pour quelques heures de soleil vers l’Atlantique, bloquant la circulation d’une ville qui souriait au travers des rétroviseurs. L’économiste Christian Lemaignan a eu beau jeu de nous rappeler que les États-Unis, patrie honnie des engrais chimiques mondiaux, sont en train de convertir un quart de leurs terres en espaces de cultures biologiques, réalisant en interne ce que l’industrie agro-alimentaire dénie à l’international.

On ne finit jamais une route commune.

Tricoter du lien social, comme à Saint-Étienne (Yohann Duriaux, web collaboratif et Comptoir numérique), autour des mets et des ordinateurs, suppose des passeurs médiateurs (les expériences Open kitchen et Vinocamp) entre le numérique et le gustatif: ne dit-on pas restaurer des données ? J’ai cité en introduction, l’anecdote symbolique d’un impétueux veau de Salers, fuyant en octobre 2011 l’abattoir de Brioude jusqu’aux urgences de cette même ville, repris malgré les protestations des usagers et renvoyé dans nos assiettes, sans doute à l’occasion de cet Eurogusto qui nous réunit en novembre, dans cet au revoir à Grégoire de Tours, ancien diacre de Brioude. Nous sommes des mangeurs de plantes et de viande, des Omnivores. Pouvons-nous, comme proposition de travail partagé, penser à améliorer les cantines des lieux médicaux sociaux, maisons de retraite et hôpitaux, après avoir introduit les classes de goût dans les écoles ?

 

Pouvons-nous, humblement, suggérer à ceux qui nous lisent d’étendre la mesure de bilan carbone et l’exigence de qualité sur les espaces quotidiens de soin, contribuant ainsi à construire des passerelles entre « Créativités & Territoires »et « Créativités & Thérapies » ? Comme les sociétés archaïques nous y invitent, il faut remettre le goût au centre de la qualité du soin et de l’accompagnement de vie. Il n’a échappé à personne que la revendication du « bien manger » transcende les classes et les clivages politiques. On peut également supposer que ce « bien manger » s’exprime en contestation des transports surchargés et que la dive bouteille équilibre l’absence de rêves dans les embouteillages. Mais il en est de la qualité comme de la santé : découvrir des espaces nouveaux suppose une maîtrise de son temps, dans une quadrature qui s’indigne de la pauvreté et des intolérances alimentaires comme culturelles.

Sylvie DALLET

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